Le chemin vers la résilience…
L’impact psychologique de l’annonce d’un diagnostic d’une pathologie chronique ou la survenue d’une situation de handicap représente un traumatisme et une perte. Nous entrons brutalement dans un état de « personne malade », ce qui modifie la perception que nous avons de nous-même et des autres, tout comme nos attentes et nos espérances au regard de notre avenir et de nos projets.
Notre intégrité physique s’en trouve affectée tout comme l’image de soi, l’estime de soi et la confiance en soi. Nous sommes alors contraints de trouver de nouveaux équilibres de vie parfois évolutifs.
Pour y parvenir, il est nécessaire de réaliser un travail de deuil de son état antérieur. Ce dernier comporte généralement plusieurs étapes distinctes (présentées initialement en 5 phases par la psychiatre et psychologue E. Kübler-Ross).
La manière de vivre ces différentes phases est singulière à chacun. En effet, certaines personnes suivront chaque étape dans l’ordre, une étape à la fois alors que d’autres les franchiront de manière désordonnée ou même, vivront plusieurs fois une même étape.
Ces dernières sont décrites comme suit :
- Le choc initial : il intervient au moment où l’annonce du diagnostic est faite. Cette dernière génère un trouble émotionnel très fort, un traumatisme laissant la personne sans émotion apparente (état de sidération)
- Le déni : c’est un mécanisme de défense qui renvoie au refus de croire l’information communiquée (ex : « ce n’est pas vrai », « c’est une erreur »).
- La colère et marchandage : attitude de révolte dirigée vers soi et/ou autrui (l’entourage, le corps médical…) où la personne est confrontée à diverses émotions telles que le sentiment d’injustice, le ressentiment, la culpabilité, l’agression etc. Cette phase peut être accompagnée de « marchandage » qui désigne l’avènement de « pensées magiques » (ex : » je suis certain(e) de pouvoir guérir même si les médecins me disent le contraire »)
- La tristesse/dépression : phase marquée par le désespoir, l’effondrement pouvant conduire à la dépression. Lors de cette phase, la personne prend conscience des conséquences que son problème de santé peut avoir sur sa vie et ressent un sentiment de perte de contrôle avec l’émergence d’incertitudes, de peur et d’une image de soi négative. Un sentiment d’incompréhension de la part de l’entourage est souvent ressenti susceptible de favoriser isolement, solitude voire exclusion.
- La résignation : étape caractérisée par l’abandon d’une forme de lutte et par l’espoir de retrouver une vie « comme avant » (« je ne serai plus jamais comme avant »). Lors de cette période, nécessaire pour évoluer et se reconstruire, aucune projection n’est encore possible : la personne vit dans le présent « au jour le jour » et tente d’intégrer, pas à pas, la perte.
- L’acceptation : étape marquée par l’acceptation réelle de la perte. La maladie ou la situation de handicap est pleinement « intégrée » ou « supportée ». La personne apprend progressivement « à composer avec » dans son quotidien et redevient, petit à petit, actrice de sa vie.
- La reconstruction : lors de cette dernière phase, une nouvelle vie est envisagée (l’acceptation seule ne suffit pas). Ici, la personne parvient à se construire à son rythme dans de multiples domaines (image de soi, rapport aux autres, vie professionnelle, vie personnelle etc.), à réorganiser sa vie en fonction des exigences de la société et de l’environnement au regard de ses ressources personnelles. Elle se projette à nouveau vers l’avenir en adaptant ou en définissant de nouveaux projets de vie, porteurs de sens pour elle, en s’appuyant éventuellement sur ses relations sociales. Ce palier renvoie à un processus de résilience active consistant à prendre acte de l’événement traumatique de manière à ne pas (ou plus) vivre dans le malheur et à se reconstruire d’une façon socialement acceptable.
Connaître ces différentes phases peut aider grandement à la compréhension des émotions ressenties après l’effraction du traumatisme. Traverser ces périodes reste un processus normal et légitime.
Cela peut aussi aider la personne concernée à conscientiser que rien n’est figé et que le cas échéant, elle pourra tout à fait reprendre sa vie en main, se reconstruire face à l’adversité et se projeter vers l’avenir.
Dès lors que l’individu a retrouvé sa capacité d’espérer et parvient à s’inscrire de nouveau dans un projet de vie tourné vers l’avenir, on parle alors de résilience. Rappelons que la résilience est l’ensemble des processus permettant de surmonter un traumatisme psychologique (ne pas se décourager, ne pas se laisser abattre, rebondir, ne plus vivre dans la dépression etc.) afin de se reconstruire et de retrouver un fonctionnement adapté et équilibré.
La résilience est un formidable réservoir de santé dont disposerait chaque individu (Lemay, 1999) et est unanimement considérée comme un potentiel présent chez tout un chacun (Anault, 2005). Cependant, si les mécanismes de résilience peuvent être activés spontanément par certaines personnes lors de circonstances traumatiques ; chez d’autres individus, ils nécessitent d’être stimulés par des processus d’aide thérapeutique. Le travail thérapeutique favorise l’émergence d’un processus résilient en transformant le traumatisme en force motrice.